Qu'est-ce que le Département Santé des forêts ?
Créé en 1989, le Département de la Santé des Forêts (DSF) est en charge de la surveillance sanitaire des forêts françaises de métropole. Pour assurer la protection et la qualité des forêts, le réseau de forestiers du DSF surveille les forêts, diagnostique les problèmes sanitaires liés aux arbres, aide et conseille les gestionnaires et les propriétaires. Il suit l’évolution et l’impact des ravageurs des forêts et identifie les éventuels problèmes émergents. Le DSF, c’est 10 000 observations sylvosanitaires par an ! Le DSF est organisé en cinq pôles régionaux ou interrégionaux : Nord-Ouest, Nord-Est, Nouvelle-Aquitaine, Auvergne-Rhône-Alpes et Sud-Est. Ces pôles animent le réseau de forestiers de terrain et sont hébergés au sein des Directions Régionales de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt (DRAAF). A Paris, la Direction Générale de l’Alimentation (DGAL) définit la stratégie de surveillance de la santé des forêts. Quatre experts nationaux appuient ce réseau. Ils se répartissent les thématiques suivantes : pathologie forestière, entomologie forestière (étude des insectes), dépérissements, forêt méditerranéenne, changements climatiques, télédétection.
Si vous observez ce type de dégâts près de chez vous contactez :
Orso Cerati - Technicien du CRPF de Corse - Référent DSF 06.83.09.27.67 orso.cerati@cnpf.fr
ou la FREDON Corse 04.95.26.68.81
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Portrait
Le bombyx disparate est un papillon présent dans l’hémisphère nord. La femelle pond ses œufs sur le tronc des arbres une fois par an en juillet/août. Les œufs éclosent au printemps suivant (avril) et la croissance des chenilles va s’étaler sur environs 2 mois, période durant laquelle, elles occasionneront des défoliations sur les arbres. Au stade de jeunes chenilles, celles-ci sont facilement dispersées par le vent, ce qui augmente le nombre et la dispersion des foyers. Courant juillet, les chenilles adultes se transforment en chrysalides, puis en papillons, s’accouplent et pondent les œufs de la génération suivante. Ces gradations durent entre 2 et 4 ans et se régulent de manière naturelle (baisse de la quantité de nourriture, attaques de parasites et prédateurs).
L’invasion des chenilles et ses conséquences
Parmi les nombreuses espèces végétales dévorées par la chenille du bombyx, cette dernière semble avoir une préférence pour les chênes verts et lièges provoquant ainsi d’importants dégâts. Toutefois étant polyphage, elles s’attaquent, en cas de grosse pullulation et donc de famine, à l’ensemble des végétaux présents (arborées, arbustives et herbacées). Si les défoliations même totales ne provoquent pas la mortalité directe des arbres, elles compromettent largement les glandées et diminuent la croissance de l’année. D’autre part, la répétition des attaques constitue un facteur d’affaiblissement et rend les arbres plus sensibles aux facteurs extérieurs, comme le stress hydrique ou les attaques des parasites de faiblesse (insectes cambiophages..). Au regard de la santé humaine, la chenille du Bombyx ne possède pas de poils urticant contrairement à la processionnaire du pin. Elle ne présente donc pas de gros risques, si ce n’est des allergies chez certains sujets. Cependant, il est évident, qu’elle occasionne de par leur nombre un désagrément pour les habitants des campagnes et de réels préjudices pour l’hôtellerie de plein air.
Historique des gradations en Corse
Tous les 7 à 12 ans, la chenille du Bombyx Disparate provoque dans nos chênaies des dégâts importants et principalement dans la subéraie de Porto-Vecchio. A noter que des petits foyers ont touché la partie ouest du cap Corse en 2016 et 2017. Pour la dernière grosse gradation dans l’extrême sud, les chiffres étaient parlants puisque de 5000 ha pour l’année 2000, nous étions passés à plus de 40000 ha en 2001 pour la Corse du Sud.
Précautions
Du fait de l’affaiblissement des arbres, il est fortement conseillé de ne pas lever le liège les années de fortes attaques de bombyx.
Actions / Méthode de lutte
La lutte à grande échelle sur le plan forestier n’est ni nécessaire ni souhaitable. En effet, même s’il existe un traitement micro biologique épandable par voie terrestre ou aérienne celui-ci reste en plus du coût, préjudiciable au niveau environnemental et d’efficacité très limité. En zone urbaine et péri-urbaine, face au problème du désagrément causé par l’envahissement des chenilles, des traitements ont été réalisés en 2001. Les résultats n’ont pas été probants, puisque sur les zones traitées la défoliation n’a été retardée que de quinze jours. Les raisons de cet échec sont multiples. La principale est liée à la superficie des zones traitées. En effet, les demandes de traitement des propriétaires concernant dans la majorité des cas leur habitation et un peu de terrain, les surfaces traitées ont été de l’ordre de l’hectare. La persistance d’action du BT n’étant que de l’ordre de 10 à 12 jours, l’épandage n’a fait que retarder une invasion par migration des chenilles venant des massifs forestiers limitrophes.
Retrouvez l'article dans Furesta di Corsica N°2 de juin 2018 rédigé par Orso Cerati.
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Historique
La cochenille a provoqué dans les années 60, le dépérissement des forêts de pins maritimes du département du Var, avec une surface de 120 000 hectares de pins détruits ou coupés. En Corse, elle sévit depuis sa détection en 1994 dans la région de Ponte-Leccia.
Biologie de l’insecte
Strictement présente sur pin maritime, la cochenille est un insecte piqueur-suceur de petite taille (1 à 4 mm). Au printemps, les petites larves se fixent au fond des infractuosités de l’écorce du tronc et des grosses branches. Pour s’alimenter, elles enfoncent leurs stylets dans les tissus vivants du végétal.
Dégâts sur l’arbre
Matsucoccus feytaudi ne provoque pas la mortalité directe des pins. En phase épidémique, les arbres peuvent abriter plusieurs dizaines de milliers d’individus sur le tronc. Pour ce défendre l’arbre réagit aux piqûres en exsudant de la résine afin de limiter la fixation des larves dans les fissures de l’écorce. Ce stress physiologique, associé aux épisodes de sécheresse hydrique, occasionne un affaiblissement important des arbres, les rendant vulnérables au cortège d’insectes xylophages secondaires comme le pissode, les scolytes et la pyrale du tronc. En phase épidémique, les arbres les plus sensibles n’en réchapperont pas. Le suivi depuis 2002 de placettes par le DSF au cœur du foyer de Ponte-Leccia montre un taux de mortalité globale de l’ordre de 35 % des arbres. Les mortalités sont plus marquées sur les stations défavorables, plus sèches et plus chaudes (altitude inférieur à 500m). La vigueur des arbres (sols et bilan hydrique) est un critère majeur de survie aux infestations des ravageurs secondaires.
Situation en corse
Actuellement, la cochenille est présente sur l’ensemble de la Haute-Corse, le front d’extension vers le sud se situe le long d’une ligne approximative entre Solenzara et Ajaccio. Les massifs de l’Ospedale, Bavella (Zonza), Valle-Male sont toujours indemnes.
Lutte contre la cochenille
Par la Sylviculture
Les expériences acquises antérieurement montrent que la lutte au moyen de produits insecticides est inefficace contre la cochenille. Mais il semble que la méthode la plus prometteuse, consiste sans doute à identifier les arbres qui présentent une résistance naturelle à l’insecte. Divers critères sont retenus par l’INRA, comme l’épaisseur de l’écorce, la vigueur de l’arbre et sa capacité à réagir à l’agression. Sur le terrain un traitement sylvicole des peuplements infestés pourrait alors être pratiqué pour éliminer les arbres les plus sensibles, à partir desquels l’épidémie se propage. Trois types d’opérations sont envisageables (JACTEL et al,2005) : - Eclaircie préventive : coupe de bois sur lesquels l’insecte peut se reproduire facilement (arbres de faible diamètre et faible épaisseur d’écorce) - Eclaircie sanitaire : coupe des arbres avec coulures de résine qui représentent des sources de contamination et des sites favorables à la ponte de scolytes. La suppression des arbres fortement atteints par la pyrale du tronc n’est pas prioritaire car ils ne constituent plus de sources de cochenilles - Eclaircie sylvicole classique : favoriser la croissance des arbres et leur vigueur.Perspectives de lutte biologique
A l’instar de la lutte contre le cynips du châtaignier avec les lâchers de Torymus, une coccinelle du Portugal Iberorhizobius rondensis a fait l’objet d’une étude par l’INRA de Bordeaux en vue de son utilisation éventuelle comme agent de lutte biologique contre le Matsucoccus en Corse. Cette étude d’impact a reçu un avis favorable de l’ANSES en 2016, le dossier est actuellement à l’étude au Ministère de l’agriculture et de l’alimentation.
Retrouvez l'article dans Furesta di Corsica N°3 de décembre 2018 rédigé par Orso Cerati.
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Sur l’ensemble des régions de Corse, et malgré les travaux de rénovation, l’état sanitaire de cette essence demeure déficient depuis plus de 50 ans. Si le vieillissement et l’abandon de la châtaigneraie sont des facteurs prédisposant, le changement climatique un facteur déclenchant, plusieurs maladies participent aux maux de la châtaigneraie.
Le chancre
Détecté en Corse (Castagniccia) en 1970, le chancre est présent dans l’ensemble de la châtaigneraie corse (taillis et peuplements à fruits). Il est causé par un champignon (Cryphonectria parasitica) qui infecte les châtaigniers de tout âge, à la faveur d’une blessure naturelle ou artificielle. Il provoque la mort de l’arbre ou des charpentières en empêchant la circulation de la sève. Durant l’été, dans les taillis, on reconnaît les arbres malades à leurs flèches desséchées qui émergent des cépées touffues. Les chancres sont visibles sur le tronc et les branches des arbres touchés. Il se présente sous l’aspect d’une boursouflure rougeâtre avec fissuration de l’écorce. En Corse, la lutte biologique visant à réguler de manière naturelle la maladie a débuté dans les années 80 à travers l’introduction de souches hypovirulentes. Si les résultats sont positifs avec le maintien et la guérison d’une partie des châtaigniers, il reste cependant difficile à évaluer. Le chancre reste présent et actif dans l’ensemble des peuplements. Concernant les travaux sylvicoles de balivage (éclaircie en vue de production de bois d’œuvre), les essais du CEMAGREF montrent que l’amélioration des taillis favorise la cicatrisation des chancres et n’a pas d’influence sur l’apparition de nouveaux champignons.
L’encre
La maladie est due à l’infection des radicelles, des racines puis du collet, par deux champignons du genre Phytophtora. Les symptômes visibles sur l’arbre qui ne sont pas forcément caractéristiques, sont un jaunissement des feuilles, puis un flétrissement et un dessèchement des rameaux. Afin d’assurer le diagnostic, il est conseillé d’effectuer un examen du système racinaire et rechercher des plages noirâtres de plusieurs centimètres sur les grosses racines et la coloration des radicelles en noir ; une analyse en laboratoire est conseillée. La particularité de ce champignon est qu’il peut survivre dans un sol en se nourrissant de matière organique, même après la mort du peuplement. La maladie tue l’arbre dans un délai de 2 à 5 ans. La vitesse de propagation en tache circulaire dépend de la nature du sol. En effet, plus le sol est humide et mal drainé, plus la maladie évoluera rapidement. Suite à l’infection d’un peuplement par l’Encre, les mesures sylvicoles à prendre sont l’exploitation des arbres morts et le choix d’une autre essence lorsque le sol est contaminé. Le propriétaire désirant reboiser devra être attentif à la qualité des plants.
Le cynips
Considéré au niveau mondial comme le ravageur le plus important du châtaignier, le cynips a été détecté en 2010 sur les contreforts de la Castagniccia. Cet insecte originaire d’Asie, a envahi rapidement l’ensemble des châtaigneraies de l’île provoquant, par le développement de galles sur les bourgeons (à bois ou à fruits), une diminution de la croissance des rameaux et une baisse importante de la fructification (perte jusqu’à 80% de production de châtaigne), ainsi que de la production de feuilles. Si l’impact économique touche principalement la filière castanéicole, la forte diminution de la production foliaire limite la photosynthèse et affecte directement la croissance des arbres. La lutte biologique a été engagée à l’initiative du groupement des castanéiculteurs insulaires dès 2011, à travers des lâchers de Torymus, prédateurs naturels du Cynips. L’objectif étant dans les années à venir d’obtenir un équilibre de population entre l’insecte ravageur et son prédateur et ainsi limiter l’impact du cynips. Si les résultats sont prometteurs, les châtaigneraies restent actuellement très impactées.
VIGILANCE : Lors des travaux dans le châtaignier (élagage, abattage), il est important de ne pas brûler le branchage du châtaignier. En effet, le prédateur se développe dans les galles sèches du cynips.
Retrouvez cet article dans Furesta di Corsica N°4 de juin 2019 rédigé par Orso Cerati.
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Signalée dans les espaces verts et jardin depuis quelques années, la pyrale du buis a fait son apparition dans les milieux forestiers Corse depuis 2018. Des défoliations sont observées, entre autres, en Castagniccia, dans la région du Giussani, dans la vallée de la Gravona et sur la commune d’Ota. Utilisé par le passé principalement en vannerie, le buis n’est pas considéré comme une essence de production forestière. On le retrouve cependant souvent en sous-étage dans les vallons et milieux frais de l’île où il contribue à l’ambiance forestière et au maintien des sols.
Un insecte invasif présent depuis une dizaine d’années en France
Originaire d’Asie Orientale, la pyrale du buis serait arrivée et se propagerait en France et sur l’île via le commerce ornemental. En une dizaine d’années, l’insecte s’est réparti sur une grande partie du territoire national, jusqu’à coloniser les petits vallons de notre île.
Cycle biologique et dégâts
Dès le mois de mars, les chenilles se nourrissent des feuilles de buis. Elles dévorent l’intégralité du feuillage durant leur croissance. Lors de fortes infestations, l’écorce des rameaux est également attaquée. Après 4 semaines au stade chenille, elles tissent leurs cocons entre les feuilles. Les papillons adultes pondront leurs œufs sur la face inférieure des feuilles. La pyrale peut produire 2 à 3 générations par an. En forêt, les attaques entraînent des défoliations fortes qui peuvent être totales sur certaines zones. Si le buis refeuille en général la saison suivante, la répétition des attaques peut avoir un impact fort sur la vitalité de cet arbuste, et parfois provoquer le dépérissement de certains brins suite au décapage intensif de rameaux.
Impact de l’arrivée de la pyrale dans les milieux forestiers
Du point de vue de la gestion des espaces naturels forestiers, l’impact des défoliations de buis est difficile à évaluer car ses fonctions en termes d’habitats et de biodiversité ne sont pas bien définies. Le buis joue notamment un rôle important de protection de l’avifaune, mais aussi au niveau de la stabilité des versants et des berges. La défoliation totale qui induit l’affaiblissement et le risque de mortalité des buis, a une incidence sur le risque incendie pendant la période estivale où les feuilles sèches restent sur l’arbuste suite au décapage des chenilles. Si les chenilles et les soies ne présentent aucun risque sanitaire pour le public, l’importance des populations peut provoquer une gêne et une inquiétude des promeneurs et autres utilisateurs de l’espace naturel. Les riverains des forêts peuvent aussi être gênés par des nuages de papillons lors des vols d’été, notamment pendant la nuit.
Les solutions de régulation en milieux forestier vont se développer à moyen terme
Si des solutions pour les buis ornementaux, comme la mise en place de pièges à confusion sexuelle ou notamment le traitement à base de Bacillus thuringiensis (Bt) existent, leurs mises en application ne sont pas adaptées aux milieux forestiers. En effet, la mise en place d’un traitement, tant du point de vue technique (accès en forêt, épandage en sous-bois), qu’économique (coût/ bénéfice) et environnemental (impact du produit sur les autres papillons sauvages protégés) n’est pas envisageable et souhaitable en forêt. Sur le moyen terme, l’objectif est de développer la lutte biologique, à l’instar du cynips du châtaignier, en recherchant les parasitoïdes et prédateurs naturels de la pyrale, afin de développer leurs populations et ainsi favoriser un équilibre naturel. Un programme nommé BIOPYR a été initié depuis 2017 par l’INRA pour collecter et élever les insectes et ainsi trouver les auxiliaires les plus efficaces.
Retrouvez cet article dans Furesta di Corsica N°5 de décembre 2019 rédigé par Orso Cerati.
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Dans un contexte de dépérissements observés depuis plus d’une vingtaine d’années sur l’ensemble du pourtour méditerranéen, le Département de la Santé des Forêts (DSF), avec l’appui des Correspondants Observateurs, a développé depuis 2013 un suivi spécifique sur le chêne-liège afin et de suivre la santé des suberaies en Corse et sur le continent
Un réseau de suivi dans le temps
Le protocole repose sur un réseau inter-régions de 33 placettes de 20 arbres chacune, installées dans les 4 massifs français concernés : Corse (5 en Corse-du-Sud et 5 en Haute-Corse), Landes (3 sites), Pyrénées-Orientales (5 sites) et Var (15 sites). L’ensemble des 660 arbres numérotés est suivi annuellement aux environs du 15 octobre. L’évaluation sanitaire repose sur l’observation de trois critères au niveau du houppier : la mortalité de branche, le déficit foliaire par rapport à un arbre de référence sain et la coloration anormale. L’ensemble des problèmes sanitaires observés sont également relevés.
Evolution de l'état sanitaire entre 2013 et 2018
L’état sanitaire des suberaies est variable selon les régions. Le déficit foliaire moyen varie de 30 à 60 % selon les massifs. Le pourcentage moyen de mortalité de branches est de 10 % pour 3 massifs (Corse-du-Sud, Var et Landes). Il est plus élevé sur la Haute-Corse (20%) et les Pyrénées-Orientales (20 à 30 %). Si sur l’ensemble des régions, les chênes présentent des symptômes de stress marqués, l’état de santé des arbres ne se dégrade pas, et les mortalités enregistrées sur la période (2013-2018) sont assez faibles. En effet, aucune mortalité n’est apparue sur les placettes de Haute-Corse et des Landes. Seulement 1 arbre a été comptabilisé comme mort sur les placettes de Corse-du-Sud en 2013.Les mortalités les plus importantes sont observées dans les Maures et l’Estérel, à partir de 2015 avec un pic en 2017, année qui clôt une période de 3 années consécutives de sécheresse.
Les problèmes sanitaires relevés
Parmi l’ensemble des observations sanitaires ayant un impact sur l’arbre (déficit foliaire, mortalité de branches), 60 % concernent des problèmes d’origine anthropique ou abiotique (blessures, feu, sècheresse, vent). Sur l’île et dans les Landes, les blessures liées aux levées de liège mal effectuées représentent le principal dégât abiotique connu. En 2015, l’étude1 que nous avons menée en Corse sur le lien entre changement climatique et qualité sanitaire des arbres, présentait ces blessures comme le premier facteur expliquant les problèmes sanitaires observés. Ces blessures sont également observées dans le Var et les Pyrénées-Orientales. Cependant les blessures des arbres ne peuvent pas expliquer certains déficits foliaires importants observés. Afin de cerner les facteurs à l’origine de ce constat, des analyses de données ont permis d’établir des relations entre le déficit foliaire des houppiers, la qualité des stations forestières et le niveau de stress hydrique de l’année précédant la notation.
L’évaluation qualitative des stations (défavorable, moyenne et favorable), a permis de mettre en évidence, un gradient à 3 niveaux, qui montre que le déficit foliaire est plus élevé sur les stations défavorables. Concernant la relation avec la sècheresse climatique, quantifiée par le nombre de mois secs (indice de GAUSSEN), l’analyse montre une corrélation directe entre l’importance du déficit foliaire et le déficit hydrique de l’année précédente.
Si la causalité du changement climatique sur l’état sanitaire des suberaies n’est pas directement démontrée, le lien direct avec les évènements météorologiques à court terme ne laisse plus de doute. Libre à chacun d’interpréter à sa manière, l’impact cumulé de ces sècheresses répétées sur l’état sanitaire de nos chênes. Les facteurs biotiques interviennent également pour expliquer la défoliation des houppiers. En effet 38 % des observations sont liées à des insectes, avec notamment les chenilles défoliatrices comme le Bombyx disparate. Concernant les pathogènes qui ne représentent que 2% des signalements, il est important de mentionner le charbon de la mère qui contribue activement au dépérissement des chênes-lièges affaiblis dans tous les massifs français.
Retrouvez cet article dans Furesta di Corsica N°6 d'août 2020 rédigé par Orso Cerati.
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Cycle biologique et dégâts
Papillons nocturnes, les adultes sortent de terre au cours de l’été. Suite à la phase d’accouplement, la femelle pond entre 70 et 300 œufs sur une branche de pin. Après l’éclosion, les chenilles se nourrissent des aiguilles du pin, tout en restant reliées entre elles par un fil de soie. En automne, les chenilles construisent un nid pour passer l’hiver, duquel elles ne sortiront que pour s’alimenter de nuit. Au printemps, la colonie conduite par une femelle quitte l’abri et se dirige vers le sol. C’est la procession de nymphose : toutes les chenilles se tiennent les unes aux autres et se déplacent en longue file. Au bout de quelques jours, elles s’arrêtent dans un endroit bien ensoleillé pour s’enfouir dans le sol et réaliser leurs métamorphoses. L’émergence des adultes aura lieu l’été qui suit sur le littoral et un an après en montagne.
Si la processionnaire est toujours présente dans les peuplements, l’intensité des dégâts sur les pins larici ou pins maritimes reste variable selon les années. En effet lors des fortes pullulations, elle peut parfois occasionner des défoliations totales de peuplements. À noter, que ces attaques sur des peuplements adultes, en conditions favorables, ne provoquent pas la mortalité des arbres atteints. Cependant la répétition des défoliations peut diminuer la résistance des jeunes tiges et des sujets affaiblis face aux attaques de parasites de faiblesse (scolytes, …).
Risques sanitaires chez l’homme et les animaux
Les problèmes liés aux poils urticants éjectés par la chenille, sont loin d’être négligeables et les manifestations sont très variables suivant la sensibilité de la personne. Les symptômes sont différents selon la zone de contact avec les poils : il peut s’agir de plaques rouges avec démangeaisons ou brûlures sur la peau, de conjonctivite au niveau des yeux, d’irritations des voies respiratoires lors d’inhalation ou d’inflammation des muqueuses, et vomissements lors de l’ingestion. La consultation d’un médecin est nécessaire lors de l’apparition de symptômes. Chez les animaux, les chiens et chevaux sont plus sensibles.
Recommandations et méthodes de lutte
Les peuplements de pins ont toujours montré une bonne résistance aux défoliations, même lorsqu’elles sont répétées plusieurs années. La lutte à grande échelle sur les massifs forestiers n’est ni nécessaire ni souhaitable. En effet, même s’il existe un traitement micro biologique épandable par voie terrestre ou aérienne, celui-ci reste, en plus du coût, préjudiciable au niveau environnemental. Dans les massifs fréquentés, la prévention à travers l’information du public sur le danger des chenilles, permettra de limiter les risques. En zone péri-urbaine, différentes méthodes de lutte adaptées aux différents stades de la vie de l’insecte sont envisageables :
• la lutte mécanique par destruction des nids,
• la lutte par confusion sexuelle,
• la capture des chenilles par un piège à procession fixé autour du tronc,
• la lutte biologique, en installant en nombre des nichoirs à mésange,
• la lutte microbiologique à travers la pulvérisation d’un bioinsecticide
Retrouvez cet article dans Furesta di Corsica N°8 de décembre 2020.